Avec le confinement, la fréquentation des transports collectifs s’est effondrée. Or, les transports collectifs sont un maillon indispensable des systèmes de mobilité de nos villes. Si l’on veut progresser vers une mobilité plus durable et décarbonée, il est indispensable de retrouver leur part modale pré-crise et de la faire progresser. Cela nécessite de proposer une offre efficiente dans des conditions permettant de rassurer les usagers.
Dans la première phase de déconfinement, ce sont la gestion de l’urgence et l’expérimentation qui ont prévalu. Cela est notamment passé par des mesures sanitaires ou d’aménagement temporaires mises en places par les exploitants et les autorités organisatrices de la mobilité. On peut notamment citer :
- l’obligation du port des masques et du respect des règles de distanciation
- la signalétique et l’information des voyageurs
- la présence massive de personnel pour la gestion des flux
On notera que ces mesures ont un impact significatif sur les équilibres financiers des exploitants, compte tenu notamment du personnel mobilisé.
Ainsi, comment pérenniser ces règles sanitaires et de distanciation tout en s’adaptant à la situation des mois à venir et sans mettre en péril les équilibres économiques ?
A cette échéance, il s’agira de pouvoir constamment s’adapter à une situation volatile, tout en évaluant l’efficience de la réponse apportée. Cela passera notamment par :
- une plus grande souplesse dans l’organisation de l’offre de transport
- une meilleure information des usagers
- une amélioration des flux dans les stations et les pôles d’échanges
Gagner en souplesse.
Concernant l’offre de transport, il parait nécessaire d’aller vers plus de souplesse dans son organisation. En effet, l’offre antérieure au confinement, relativement rigide, était basée sur des générateurs de flux dont la hiérarchie a été chamboulée (certains ont notamment fermé : universités, stades), ainsi que sur des comportements de mobilité fortement modifiés (la baisse relative de la mobilité selon les secteurs dépend des capacités des usagers à télétravailler).
Ainsi la période actuelle pourrait-elle être l’opportunité de réorganiser certaines lignes de transport collectif afin de les rendre plus adaptées à la nouvelle demande mais également mieux interfacées avec les modes actifs et les micromobilités. On peut penser à des lignes express avec moins d’arrêts, auxquelles les usagers accèderaient en vélo ou en trottinette, voire en véhicules autonomes.
Pour pouvoir mettre en œuvre ce réseau plus dynamique et l’adapter sur des périodes courtes, il est nécessaire d’accroître notre connaissance des comportements de mobilité. Cela nécessite des dispositifs permanents de suivi de la mobilité qui doivent croiser les données des différents modes, voire être en mesure de reconstituer les chaînes de mobilité des usagers. Cela est possible via des applications smartphone par exemple qui peuvent être déployées en un temps relativement court.
Ce sont ces dispositifs de mesures et de suivi qui, croisés avec l’expérience métier, permettront d’avoir une démarche plus agile d’expérimentation et d’évaluation.
En lien avec la collecte de données, une réflexion sur les outils de modélisation est également à mener. Les situations à venir étant inédites, les modèles statistiques historiques basés sur le big data ne sont plus adaptés et des approches issues des modélisations de comportements seront à privilégier après analyse des premières semaines de mobilité post-confinement.
L’information avant tout !
Un autre levier pour une offre plus attractive est l’information voyageur reflétant l’adaptation de l’offre et qui pourrait être enrichie de données sur la charge des véhicules (en temps réel ou en prédictif, en amont et au cours du voyage) de conseils sur la meilleure heure de déplacement, pour éviter l’affluence, ou pourquoi pas aller jusqu’à des dispositifs de places garanties réservables dans certains types de véhicules.
Cette information enrichie pourrait ainsi être un levier de modification des comportements, en indiquant par exemple aux entreprises comment modifier leurs horaires pour limiter la charge dans les transports.
Des flux sous contrôle.
Au-delà des lignes de transport, il y a également une réflexion à mener sur les stations et les pôles d’échanges dans lesquels le respect de la distanciation est un sujet majeur.
Les outils de simulation de flux usuels peuvent être adaptés pour tenir compte des comportements de distanciation. Ces analyses, couplées avec les retours d’expériences des mesures déjà mises en places, pourront permettre d’évaluer numériquement de nouvelles organisations des flux ou des systèmes de régulation et de contrôle à l’entrée en station afin de déterminer les plus pertinentes.
Ici encore, la question de l’acquisition de données est cruciale, par exemple via des systèmes de comptages en temps réel d’usagers en station. Cette réflexion sur les stations devra nécessairement englober les espaces publics alentour, notamment dans le cas de gestion de files d’attentes extérieures.
A plus long terme, il nous faudra également collectivement revoir nos principes de conception pour permettre à nos infrastructures de transport d’être plus résilientes et évolutives, car la prochaine crise sera probablement différente de celle que nous traversons aujourd’hui.