Quel est le devenir du métier d'ingénieur de la construction ? Comment notre profession s’inscrit-elle au regard des grandes problématiques de notre siècle ? Claude Le Quéré, directrice des ouvrages d’art chez Egis et présidente de l’association française de génie civil, nous fait part de sa vision du métier d’ingénieur et de son devenir.
Depuis plusieurs années, l’ingénierie semble ne plus séduire les jeunes car trop exigeante et trop peu valorisée dans la société. Le domaine de la construction n’attire plus car il serait en conflit avec la quête de sens des nouvelles générations.
Pourtant, le sens de l’action est désormais au cœur de tous nos échanges : il est question de ne pas simplifier à l’excès les problématiques et de promouvoir des solutions dont l’efficacité et l’impact sont à la hauteur des enjeux.
Je suis convaincue qu’il faudra continuer de construire pour servir l’intérêt général. Renoncer à construire, ce serait aussi renoncer à corriger les inégalités territoriales, renoncer à transformer nos villes pour de nouveaux usages, renoncer à améliorer l’efficacité ou la durée de vie de nos équipements, renoncer à donner à tous l’accès minimum à l’eau, à l’énergie, au logement de la santé, au travail, à la culture et à la formation.
Bien sûr, chacun a le droit et même le devoir de questionner cette notion d’intérêt général, de se préoccuper de l’efficacité – au regard de l’enjeu climatique – des processus politiques qui permettent l’émergence de projets d’utilité publique. Ainsi, chacun peut individuellement questionner le bien fondé des projets auxquels il participe, ainsi que la trajectoire choisie par son entreprise.
Pour autant, il faut bien que les projets qui relèvent de l’intérêt commun soient construits, mieux, voire autrement, dans le respect des financements. Dans ce contexte, l’ingénierie a tout son sens. Le métier d’ingénieur consiste justement à trouver des solutions optimisées aux problèmes complexes. Dans la construction, c’est arriver à concilier sobriété, durabilité, adaptabilité, minimisation des impacts et coût global pour la société. Dans un environnement complexe, c’est la mission des ingénieurs d’objectiver les contraintes, d’intégrer et de faire la synthèse de phénomènes multiples, de proposer une démarche rationnelle, graduelle et collective jusqu’à une conception qui réponde efficacement aux besoins, d’ordonnancer un projet pour le mener à bien en respectant des contraintes budgétaires toujours plus fortes.
